SOPHIE LECOMMANDOUX, fondatrice de l'APASC

Caroline Bee • mars 03, 2022

Faire connaître le syndrome de Currarino


SOPHIE LECOMMANDOUX, fondatrice de l'APASC

Sophie Lecommandoux

Fondatrice de l'Association des Personnes Atteintes du Syndrome de Currarino

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?


J’aime à me présenter comme une maman aiMante plutôt qu’aiDante. Ma fille est née en 1999 avec une maladie rare : le syndrome de Currarino. Cette pathologie rare, qui touche une grossesse sur 100 000, associe des problèmes urinaires, digestifs et neurologiques. Partant de ces trois grands signes, l'évolution des enfants est complètement différente et les atteintes se font à des degrés variables.


Mon enfant a été prise en charge dès sa naissance en service de chirurgie viscérale pédiatrique à Montpellier pour une malformation ano-rectale, un double reflux urétéral et un lipome situé au niveau du sacrum malformé. Cette maladie génétique rare est évolutive et nous ne savions pas si notre fille allait pouvoir marcher et les problèmes sphinctériens que la pathologie allait engendrer. Mon mari et moi avons dû être forts pour affronter la longue route de difficultés diverses que nous allions rencontrer.


Le milieu scolaire a parfois été source d’obstacles. Nos enfants ont besoin d’avoir accès aux sanitaires sans restrictions et de pouvoir boire régulièrement de l’eau tout au long de la journée. L’hygiène de vie et l’alimentation ont toute leur importance. Il fallait jongler avec les menus scolaires et les médicaments pour pouvoir laisser notre fille accéder à la cantine avec les autres enfants. Tout en continuant à travailler, le parcours de vie a été jonché d’obstacles épuisants pour la famille (médical, scolaire, administratif…).



Aviez-vous déjà entendu parler de ce syndrome ?


À 27 ans, je ne savais même pas qu’il existait des maladies rares. Mon suivi de  grossesse classique ne m’a jamais alerté sur un éventuel problème par la suite. Cela a donc été une découverte inattendue et bouleversante à la naissance de notre enfant. Il y a vingt-deux ans, il n'existait pas d'information sur le Net concernant ce syndrome. Accompagnés par les médecins de l’hôpital, nous avons fait notre chemin en nous sentant malgré tout très seuls avec cette maladie rare.

En 2004, quand nous avons commencé à sortir un peu la tête hors de l'eau, j’ai commencé à chercher des informations à l’étranger et en France pour tenter de trouver des mamans dans mon cas, des familles touchées par ce syndrome. De fil en aiguille, je me suis intéressée aux maladies rares. Nous avons pu rencontrer plusieurs médecins de l’hôpital Necker enfants malades à Paris dont le Professeur Michel Zerah, à l’origine de notre acronyme. La décision de créer l’APASC s’est faite à ce moment- là.



Justement, parlez-nous de l'association APASC...


L’association APASC a pour but de faire connaître le syndrome de Currarino, d’accueillir et d’orienter les familles tout en soutenant la recherche. Depuis sa création en 2004, nous avons répertorié environ 200 foyers en France. Il en existe très certainement beaucoup plus. Une des difficultés de cette maladie rare est qu'elle touche à l'intime, une partie « tabou » du corps. C’est l’exemple type du handicap invisible à l’œil nu. De plus, on ne parle pas de poop & pee (pipi caca) dans les familles et les difficultés sont souvent passées sous silence. Aujourd’hui, avec le développement des réseaux, les parents confrontés à la maladie font des recherches internet jusqu’à l’APASC. L’association les guide au mieux vers les équipes compétentes qui connaissent ce syndrome, qui ont déjà eu des cas et peuvent le gérer le mieux possible.


 

Quelles sont les réalisations notables de l’APASC ?


Sur notre site internet nous proposons l’accès à la carte d’urgence et une information médicale précise sur la pathologie, mais pas toujours facile d’accès au non sachant. Forte de mon expérience de maman concernée et des témoignages des familles rencontrées au fil des années, j’avais bien en tête leurs besoins. L’idée et l’envie de créer un livret illustré accessible aux enfants et aux familles touchées par le syndrome de Currarino a démarré en 2019 après une rencontre avec Dubourdon Productions. Nous avons démarré les recherches de financement puis nous avons travaillé avec une équipe médicale pluridisciplinaire et des familles pour réaliser ce livret de 36 pages avec plus de 150 illustrations.

 

Le but est d'expliquer la maladie avec des mots simples et des schémas clairs. Il est un lien concret pour l’enfant et les familles avec les questions de leur entourage qui ne comprend pas toujours très bien ce qui arrive ou les examens médicaux que l'enfant doit subir. Le livret illustré a bénéficié du soutien de l'APHP et financé par l'APASC, la Fondation de France, un financement participatif de Human&Go et Malakoff Humanis et divers dons de particuliers. Fin 2020, le livret était imprimé. Depuis, je contacte l’ensemble des CHU dans les services de chirurgie pour rencontrer les spécialistes et leur présenter. J'avance doucement, mais sans me décourager car il a du succès auprès des familles, des enfants et du corps médical. Les retours sont positifs et me donnent de l'énergie à continuer mes actions bénévoles toujours très riches humainement.

https://apasc.pagesperso-orange.fr/


Parlez-nous de votre implication au sein du réseau maladies rares et en éducation thérapeutique.


En effet, depuis la naissance de ma fille je me suis vraiment impliquée pour faire connaître les maladies rares. L'APASC fait partie de l'Alliance Maladies Rares depuis plusieurs années maintenant. Installés dans le Gard, nous faisons partie du Réseau Maladies Rares Occitanie. L’association est affiliée depuis toujours à la FSMR (filière de santé maladies rares) NeuroSphinx et au centre de référence pour les malformations ano-rectales et pelviennes rares (MAREP), tous deux situés à l’hôpital Necker. La filière, qui réunit 15 associations, a proposé début 2021 aux membres des associations une « formation 40 heures parent expert » à distance (cause COVID) avec l’organisme EmPatient.


Cette formation à l'ETP (éducation thérapeutique du patient) à destination des parents a été une révélation pour moi. Dès la deuxième session, j’ai cherché à approfondir le sujet de l’éducation thérapeutique du patient et conforter mes connaissances par un diplôme universitaire. Je prépare un DU à la faculté de médecine de Montpellier au titre de l’année universitaire 2021-2022. Dans ce cadre, j’ai souhaité suivre un stage au sein du CHU Lapeyronie, là où avait été hospitalisée ma fille, avec les équipes médicales qui ont changé depuis. Le bâtiment a été restructuré et le hasard d’un rendez-vous s’est fait dans un bureau qui n’était ni plus ni moins que la pièce où j’ai vu ma fille pour la première fois. Il était coloré, gai et vivant, rien à voir avec la chambre neutre au lit blanc à barreaux, machines, bip… de l’époque. Ce hasard a généré beaucoup d’émotion !


D’une certaine manière la boucle est bouclée, mais j’ai à cœur de continuer à faire mon possible pour aider les familles au sein d’un futur programme ETP je l’espère.

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