REBECCA BILLY, coordinatrice à La pause Brindille

Agnès Diter • oct. 16, 2023

Mettre un rayon de soleil dans la vie des jeunes aidants.


CELINE FERON

Rebecca Billy

Coordinatrice opérationnelle
à la pause Brindille

Rebecca, pourriez-vous commencer par vous présenter et nous parler de votre rôle au sein de la pause Brindille ?


Je m’appelle Rebecca. J’ai 27 ans. J’ai un parcours littéraire et une formation en gestion de projets sociaux et environnementaux.  Je suis coordinatrice opérationnelle à La pause Brindille. Mon rôle au sein de l'association est de veiller à la coordination et à la mise en œuvre de nos actions en faveur des jeunes aidants.

Je m'implique dans divers aspects de notre mission, allant de la sensibilisation au soutien des jeunes aidants et au développement de notre communauté.


 

Pourriez-vous nous en dire plus sur La pause Brindille et son histoire ?

 

La pause Brindille, c’est une association qui soutient les jeunes aidants fondée en mai 2019 par Axelle Enderlé. Axelle est maman d'une petite fille en situation de handicap. Elle a également une grande fille de 17 ans qui est aujourd'hui une jeune aidante. Axelle a été confrontée à un cancer du sein. Elle a créé La pause Brindille en s'inspirant de son expérience personnelle et des défis qu'elle a dû relever.

Au départ, La pause Brindille avait pour objectif de soutenir les jeunes aidants, mais aussi les adultes de plus de 25 ans.

 

En 2020, au moment du confinement, nous avons recentré nos efforts sur les jeunes de moins de 25 ans. Nous nous sommes, en effet, rendu compte que sur notre territoire d'ancrage qui est la métropole de Lyon, il n'existait rien à l'époque pour les jeunes aidants.


J’ai rencontré Axelle à ce moment-là, en mars 2020. Je venais de terminer mes études. Et je me suis engagée dans l’association pendant la crise sanitaire. Il faut dire que je suis extrêmement sensible à la cause des jeunes aidants, car je l’ai été moi-même lorsque j’étais au lycée. Aujourd’hui, je refuse que des jeunes grandissent tous seuls, sans soutien, sans écoute, avec le risque de craquer à terme. Je m’engage donc pour leur offrir ces espaces d’écoute et de partage bienveillants dont ils peuvent avoir besoin. 


On a ainsi rapidement commencé à avoir des contacts avec des jeunes en grande souffrance psychologique. Si le confinement a été anxiogène pour toute la population, la situation dans les familles des jeunes aidants était encore plus lourde à porter.

Combien existe-il de jeunes aidants en France ?


Il n’existe pas de réel chiffrage de la jeunesse aidante en France. On parle toutefois de 700 000 à 1 million 500 000 jeunes concernés.


En 2019, l’étude ADOCARE, menée au sein de l’Université Paris Descartes dans le cadre du projet JAID, s’est intéressée plus particulièrement aux lycéens. Elle a révélé que 43 % des élèves interrogés avaient un membre de leur famille malade ou en situation de handicap. 14 % de ces adolescents avaient une position d'aidant familial. Cela équivaut à environ 3 à 4 élèves par classe. Ils s’occupent, par exemple, de faire les courses ou d’entretenir le foyer. Mais ils apportent également un soutien moral.

 

Cette situation mérite toute notre attention, car elle peut avoir un impact sur le long terme pour certains. Bien sûr, tous ne sont pas dans ce cas, mais le rôle d’aidant peut impacter leur choix de vie personnelle, leur vie sociale, leur bien-être, leur santé et leur scolarité.


À La pause Brindille, nous voyons trop de jeunes qui s’épuisent et craquent. C’est pourquoi nous voulons agir en amont.

 


Quels sont les missions de La pause Brindille et quels services offrez-vous aux jeunes aidants ?


Tout d’abord, il faut savoir que nous ne sommes pas une association de professionnels du soin ou du social. Notre mission à La pause Brindille est de développer et d’animer une communauté de soutien entre jeunes aidants. Il s’agit de leur accorder des espaces d'échange, d'écoute et de partage entre jeunes aidants, par les jeunes aidants. Nous nous concentrons sur trois axes d'actions : la sensibilisation, le soutien aux jeunes et le développement de cette communauté.

Quels sont les axes de sensibilisation de La pause Brindille ?

 

La question de la jeunesse aidante n’est pas du tout médiatisée en France. Ces jeunes ne sont pas reconnus en tant qu’aidants par leur entourage. Et ils ne se perçoivent pas non plus comme tels. Ils “s'évaporent” dans la population, sans bénéficier d'un accompagnement, de soutien ou d’aide.

 

C’est pourquoi notre première action consiste à faire de la sensibilisation pour détecter ces jeunes. Nous allons donc en parler dans les collèges, les lycées, les universités, les grandes écoles ou encore les formations médico-sociales.

 

Nous sensibilisons également différents professionnels à la position des jeunes aidants. Ce peut-être, par exemple, des éducateurs spécialisés, des psychologues, des cadres hospitaliers, des infirmières scolaires, etc. Ils relaient nos actions auprès des jeunes.

 

Enfin, notre dernier axe de sensibilisation concerne le grand public. À La pause Brindille, nous pensons que les jeunes aidants représentent un sujet de société. Alors, nous organisons des événements, des conférences avec eux.

Dernièrement, par exemple, nous avons mis en place les premières Rencontres de la Jeunesse Aidante avec le soutien de la MACIF. Elles ont eu lieu à Lyon, mais elles étaient également accessibles en distanciel. Elles ont permis de partager la parole à ces jeunes qui accompagnent un parent ou un ami dans la maladie, le handicap ou l’addiction.

 

Nous agissons aussi en passant par les réseaux sociaux (Facebook, LinkedIn, TikTok ou Instagram). Nous partageons beaucoup de contenus sur la thématique des jeunes aidants.

Nous avons également une chaîne YouTube qui regroupe plus d’une vingtaine de témoignages de jeunes aidants. En parallèle, nous avons créé un podcast qui s’appelle “ Bien cachés” dans lequel des enfants et adolescents ont l’occasion de parler de leur vécu.

CNAO

Quelles autres actions mettez-vous en place ?

 

L'un de nos principaux services est Brind’Écoute. Il s'agit d'un service d'écoute accessible partout en France. Il est tenu par de jeunes solidaires âgés de 20 à 30 ans, des bénévoles ou des personnes en service civique. Tous ont le souhait d'apporter de l'écoute de jeunes à jeunes. Ils sont supervisés par un psychologue référent.

Les jeunes nous contactent par SMS, chat. Ils nous appellent pour trouver un soutien, discuter de leurs préoccupations et recevoir une écoute bienveillante.


Nous mettons aussi en place des actions concrètes pour accompagner au quotidien les jeunes aidants. Nous avons 3 permanences digitales par semaine, le mardi, le vendredi soir et le mercredi après-midi.

Une fois par mois, nous leur proposons aussi des temps d’échange autour d’un sujet comme : la culpabilité, se projeter dans l’avenir, s’offrir du temps pour soir, etc.

 

Par ailleurs, nous organisons 2 à 3 fois par mois des activités manuelles en co-animation avec un professionnel de la discipline. Ce peut-être du bricolage, de la cuisine, etc. Ces ateliers gratuits concernent 10 à 15 jeunes sur 3 tranches d’âge :

 

●    Les enfants de 7 à 12 ans ;

●    Les adolescents de 13 à 17 ans ;

●    Les jeunes adultes de 18 à 25 ans.

 

L’objectif est de leur offrir une pause dans leur quotidien. En parallèle, cette action répond à une de leur demande : rencontrer d’autres jeunes comme eux qui peuvent les comprendre.

 

Enfin, nous souhaitons fournir aux jeunes aidants des espaces d'échange et de partage où ils peuvent se connecter, trouver des informations pertinentes et se soutenir mutuellement.


C’est pourquoi nous avons créé une communauté solidaire de jeunes aidants. Elle s'appelle la Tribu Brindille. Elle se développe au travers d’actions en ligne et d’événements en présentiel.

Nous organisons notamment le Tribu Brindille Festival tous les deux ans, une journée festive pour les jeunes aidants de 7 à 25 ans.


 

Qui sont les personnes impliquées dans la pause Brindille ?

 

L'équipe permanente de la pause Brindille compte 7 salariés, dont Axelle la directrice, Carolina, notre chargée de communication et moi-même. Nous avons également 4 services civiques et surtout, une cinquantaine de bénévoles qui nous accompagnent.

Quant à notre conseil d'administration, il est majoritairement composé d'anciens jeunes aidants.

 

Notre action ne serait pas possible sans nos partenaires et notre réseau de soutien. Nous collaborons avec de nombreux acteurs, qu'ils soient publics, privés ou associatifs.


Nous travaillons en étroite collaboration avec les assistantes sociales scolaires, les infirmières scolaires et les centres hospitaliers de Lyon. Nous sommes aussi en lien avec les fondations OCH et OVE, etc.

Sur le plan financier, nous recevons un soutien essentiel de la part de partenaires privés tels qu'Harmonie Mutuelle, la MACIF, APICIL, APRIL, la Fondation de France et la Fondation Saint-Irénée sur Lyon.

Nous bénéficions en plus d'un financement du Grand Lyon, de la ville de Lyon, de l'ARS et de la DGCS.


 

Quels sont les facteurs clés de réussite de La pause Brindille dans son soutien aux jeunes aidants ?

 

Nous travaillons véritablement en collaboration avec les jeunes. Nous prenons autant en compte leurs besoins et leurs envies. Nous veillons aussi à leur proposer des actions joyeuses et plaisantes. La pause Brindille, c’est un espace où les jeunes peuvent rire et s'amuser, tout en recevant le soutien nécessaire.


 

Comment intégrez-vous l’expertise des jeunes aidants à la pause Brindille ?



Pour nous, il est essentiel d'écouter la parole des jeunes que nous soutenons, celles des jeunes aidants eux-mêmes, sur leur propre expérience et leur ressenti. Nous mettons un point d'honneur à les placer au cœur de notre système et de nos actions pour qu'ils puissent contribuer activement à la construction de solutions adaptées à leurs besoins.

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