JEROME TRUBLET, sportif et patient ressource en diabétologie

Damien Dubois • févr. 09, 2022

Infirmier, marathonien, membre du groupe de travail Sport et Diabète de la Société Francophone de Diabétologie


Jérôme Trublet

Ancien Président de l'Union Sport et Diabète,
infirmier et sportif

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?


Je suis une personne standard de 48 ans, papa de 3 enfants qui ensoleillent ma vie, roule en monospace et suis propriétaire de ma maison. Il ne manque plus que les poissons rouges dans la cuisine pour compléter le cliché. Je me présente comme cela face à des soignants comme à des personnes diabétiques. Professionnellement, je suis infirmier en médecine du travail à la RATP. Cette approche de la prévention et de la pédagogie auprès des salariés me plait beaucoup. Il s’agit de mon activité principale.

 

Je me présente donc pas comme une personne atteinte d’une pathologie. Je ne suis pas un diabète mais une personne avec une maladie qui certes dicte pas mal de choses de ma vie. Je suis diabétique depuis l’âge de 6 ans, découvert lors d’une visite médicale en CP. Mes 2 frères sont diabétiques. J’ai donc grandi avec et j’ai toujours eu une hygiène de vie et une culture du sport qui me vient de mon père.



Comment est né votre engagement ?


Cette culture a déterminé mon rapport à l’autre et mon besoin de me dépasser en permanence, pour me prouver que je suis capable de faire du sport dans des conditions extrêmes et de repousser mes limites dans le travail. En octobre dernier, j’ai couru le marathon de Paris avec mon frère. C’est naturel. L’activité physique est aussi un traitement et un protecteur.

 

J’ai toujours eu un besoin d’enseigner, de transmettre. Le soin, c’est aussi accompagner et rendre autonome. J’ai bien connu le milieu hospitalier et suis passé par la réanimation en tant qu’infirmier. Aujourd’hui, je préfère anticiper et prévenir plutôt que guérir. En diabétologie, j’ai rencontré des personnes plus malades que moi. J’ai voulu les aider à mieux vivre leur maladie via l’activité physique et plus globalement par une hygiène de vie la plus adaptée possible.

 

En 2012, je me suis fait poser une pompe à insuline. Dans la chambre d’en face, se trouvait le président de l’Union Sports & Diabète. Nous avons sympathisé et j’ai intégré l’association en tant que secrétaire puis l’ai remplacé comme président. Nous sommes une petite équipe avec des bonnes idées et travaillons tous ensemble. Je viens d’ailleurs de quitter la présidence en janvier 2022 et reste membre du conseil d'administration.


Quel est l’objectif de l’association ?


Nous faisons la promotion de l’activité physique pour les personnes diabétiques de tous types. Nous organisons régulièrement différents stages, séjours et ateliers un peu partout en France pour pratiquer une activité physique tout en partageant un moment exceptionnel avec des professionnels de la santé, du sport ou d’autres diabétiques. Nous mettons en ligne des fiches pratiques pour bien pratiquer l’activité physique : alimentation, bonne pratique sportive, soins des pieds. Notre communauté intervient également lors de colloques et congrès.

 

Les personnes qui font appel à nous sont déjà dans une démarche proactive et son prêtes à passer à l’action. Ils ont besoin d’être motivés et accompagnés. Nous sommes également un organisme de formation. Des clubs ou des fédérations, comme celle d’aviron, nous appelle pour sensibiliser ou former leurs équipes. Nous intervenons aussi dans les écoles de soins infirmiers. Cela fait le lien avec ce qui me plait dans mon métier d’infirmier à la médecine du travail.

Union Sport et Diabète

Comment se nourrit votre expertise ?


Dans ma quête de dépassement, je pratique l’ultra trail, c’est-à-dire des épreuves de plus de 80 km. J’ai récemment couru 24h et aussi un marathon avec un patient. Attention, un marathon est une épreuve extrêmement compliquée qui se prépare en termes d’alimentation et de surveillance de l'’insuline. Je suis suivi à l’Institut National du Sport (INSEP). Je ne prône pas le sport ultra dans mon engagement mais analyser l’effet sur mon corps a fait de moi un mini-chercheur. J’ai fait des comptes rendus à de grands spécialistes et je me suis rapproché de la Société Française de Diabétologie que j’ai intégrée il y a 5 ans, au sein de son groupe de travail sport et diabète présidé par Mme le Pr Martine Duclos du CHU de Clermont-Ferrand.

 

Nous produisons des recommandations pour faire évoluer la prise en charge et aider les professionnels à conseiller leurs patients dans la pratique d’une activité physique adaptée la plus douce possible (adaptation des doses, de l’alimentation, anticiper la redescente glycémique). L’activité physique adaptée commence d’ailleurs par le jardinage, la vaisselle, les escaliers selon les capacités et envies de chacun. Je suis également patient ressource à l’Hôpital Sud Francilien à Corbeil-Essonnes où j’interviens chaque semaine dans le service du Pr Penfornis. En termes de légitimité, J’ai suivi, il y a 2 ans, un diplôme universitaire de soins aux personnes diabétiques qui intègre 40h d’ETP et j’ai commencé un diplôme universitaire d’automatisation de l’insulinothérapie. Je suis aussi diplômé de la fédération d’athlétisme pour courir moins bête.

Votre champ d’action dépasse donc l’activité physique ?


En effet. Je bénéficie d’un matériel récent et novateur, qui couple une pompe à insuline qui injecte un micro-débit d’insuline et un capteur glycémique. Les deux machines communiquent et la pompe injecte en fonction des besoins. Cela se rapproche de ce que ferait un pancréas artificiel. J’attendais cela depuis des années. La charge mentale n’est pas totalement supprimée mais le confort est très important. Trois matériels de ce type sont remboursés ou en attente de par la sécurité sociale. D’autres vont se positionner. Adolescent, je ne me voyais pas forcément adulte. Aujourd’hui, je n’ai plus de crainte à ce niveau. La vie avance. Je me rends compte de l’utilité de ce matériel. Je suis patient formateur, une fois par semaine, dans un hôpital hors les murs, pour sensibiliser à ces nouvelles possibilités de gestion de son quotidien avec le diabète grâce au numérique.

 

Cela reste du matériel électronique qui peut rendre l’âme et certains patients ne sont pas éligibles ou ne sont pas dans le bon centre hospitalier. Il faut continuer à sensibiliser à l’hygiène de vie et à l’activité physique. J’ai également créé une micro-entreprise pour donner des conférences et des formations.


 

Quels messages donneriez-vous à ceux qui veulent s’engager ?


Si je prends l’exemple d’un engagement au sein de l’Union Sport et Diabète, il peut d’abord être intéressant de faire de l’immersion. Nous avons voulu nous régionaliser, avec des référents sportifs diabétiques confirmés qui peuvent nous accompagner en province. Notre intérêt est d’avoir un maximum de sportifs de diverses disciplines pour mieux orienter. Un engagement de ce type nécessite de la pédagogie, une certaine exigence, une structuration de l’expérience qui peut être la limite de beaucoup de patients experts. C’est une charge de travail à laquelle ils ne pensent pas toujours. En tous cas, toutes les aides sont les bienvenues dans notre association.

par Agnès Diter 26 févr., 2024
Changer le regard sur le virus du SIDA, en faisant témoigner des personnes vivant avec le VIH
par Sylvie Favier 04 févr., 2024
La technologie à la portée de l’extrême vieillesse
par Sylvie Favier 10 déc., 2023
Une école sur mesure pour les enfants avec des troubles du neuro-développement : le parcours votif d’une mère
AMARANTHA BARCLAY BOURGEOIS, Directrice de l'association JADE
par Agnès Diter 29 nov., 2023
Une pionnière en France dans le soutien des jeunes aidants, en leur offrant des moments de répit et d’expression
BEBECCA BILLY, coordinatrice à La pause Brindille
par Agnès Diter 16 oct., 2023
Mettre un rayon de soleil dans la vie des jeunes aidants.
LISE MOLIMARD, chef de projet Académie des AJA, association Aïda
par Damien Dubois 21 sept., 2023
Échange entre deux citoyens engagés après été touché par un cancer en tant qu'Adolescent Jeune Adulte (AJA)
par Damien Dubois 03 sept., 2023
Ou comment passer d’un « schizo-out » à la reconnaissance du statut de Médiateur santé pair
CHARLOTTE TOURMENTE, médecin, journaliste, vice-présidente de DareWomen
par Sylvie Favier 22 août, 2023
L’engagement de Charlotte, positive et volontaire, pour l’accomplissement personnel et professionnel des femmes en situation de handicap
Show More
Share by: